Épisode 2 – 1431 : la première claque
Une fois le devis signé, il a fallu rentrer dans le vif du sujet.
Les choses devenaient concrètes. Nous avancions sur le plan de la salle de brassage, même si l’essentiel avait déjà été pensé en amont.
C’est à ce moment que les premiers problèmes ont commencé à pointer le bout de leur nez. Et pas un petit nez… plutôt le nez de Cyrano de Bergerac.
Les travaux du local
J’avais choisi d’installer ma brasserie au MIN de Rouen. Pour ceux qui ne connaissent pas, le MIN, c’est un peu le Rungis normand : un marché de gros où passent chaque jour des dizaines de professionnels de la restauration. Je trouvais le lieu stratégique.
Le local prenait forme :
- aménagement d’une chambre froide,
- modification du compteur électrique,
- arrivée d’eau adaptée pour accueillir des cuves de 1 000 à 1 500 L.
Tout avançait bien, et déjà mon premier vrai défi apparaissait : comment aménager une microbrasserie dans seulement 85 m², chambre froide incluse ?
Un vrai jeu de LEGO grandeur nature.
Et dans ce genre de configuration, chaque mètre compte. La moindre erreur peut coûter très cher. Vous me direz : « Tu n’as quand même pas fait d’erreur de cotation du local après six mois de préparation ? »
On verra ça plus tard…
Identité : qualité, quantité… et marque
Pendant que les travaux avançaient, il fallait aussi poser les bases de l’identité de la brasserie.
Une brasserie repose sur trois piliers :
- la qualité,
- la quantité,
- et l’identité.
Pour l’identité, j’ai choisi de jouer la carte locale, comme beaucoup.
Mon idée : 1431.
Ça vous dit quelque chose ? Jeanne ? Bûcher ? Rouen ? Anglais ?
Oui, 1431, c’est l’année où Jeanne d’Arc a été brûlée place du Vieux-Marché à Rouen.
Une idée originale : la bière escape game
Avec cette base historique, j’avais imaginé quelque chose d’original pour l’époque : une bière escape game.
Trois recettes, trois personnages du procès de Jeanne :
- la Jeanne,
- le Juge,
- le Bourreau.
Chaque bouteille aurait son QR code menant à un lieu clé de Rouen, permettant de réécrire l’histoire et sauver Jeanne du bûcher.



Tout était prêt :
- dépôt de marque « 1431 » à l’INPI,
- création graphique (logo, étiquettes…),
- jeu de piste dans Rouen,
- campagne de financement participatif.
La campagne démarre et je récolte 10 000 €. De quoi lancer les premiers investissements. Tout roulait…
Voici la vidéo qu’on avait tourné à l’époque pour booster la campagne de financement participatif 😂 :
Le coup de massue
Un mardi, en discutant avec un ami qui animait des ateliers de brassage, j’apprends que deux brasseurs proposent déjà une bière baptisée 1431.
Gros moment de flottement.
Je vérifie. C’est vrai.
Comment avais-je pu passer à côté de ça ? Quel con !
Leur visibilité en ligne était quasi nulle, pas de dépôt de marque à l’INPI. Voilà pourquoi j’étais passé à travers. Mais la réalité était là.
La confrontation
À l’époque, j’étais incubé chez Normandie Incubation. J’y apprends que même avec un dépôt de marque validé, je ne suis pas vraiment protégé.
Autant dire que l’INPI ne m’a pas beaucoup servi sur ce coup-là.
Je décide de contacter les brasseurs pour discuter. Rendez-vous chez eux, père et fils. Accueil glacial. J’essaie de détendre l’atmosphère, mais rien n’y fait.
Je découvre alors la réalité du milieu : je pensais que le monde des brasseurs artisanaux était fait de solidarité… la vérité est un peu différente.
Nous discutons, ou plutôt j’essaie de discuter. Aucun terrain d’entente possible. Leur philosophie n’était pas la mienne. Je repars avec plus de doutes qu’à l’aller.
Repartir de zéro
Je ne suis pas belliqueux. Je n’avais pas envie de lancer mon projet sur un conflit. Alors, j’ai décidé de changer de marque.
Pas un mot de reconnaissance de leur part. Rien.
J’aurais pu m’accrocher, défendre ma position, mais à quoi bon ?
Résultat :
- perte des investissements graphiques et vidéos,
- perte de la confiance d’une partie de mes soutiens.
J’étais abattu. Et ce n’était que le début…
À suivre.

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